CHAMPIONNAT  DE  FRANCE


                                  Photos Ouest-France C'est l'histoire d'un mec bien dans sa tête, bien sur un vélo. Un coureur qui a décidé de faire le métier à fond, parce qu'il en avait plus qu'assez, à chaque rentrée des classes, à chaque stage d'avant-saison, que ses copains l'appellent "le gros". Depuis, ce coureur, il gagne, et plus souvent qu'à son tour. En 91, Isbergues. Mouais ! Pas mal ! En 92, le Tour des Flandres ! Sur le coup, ça avait un peu fait rire tout le monde, sauf les Flamands. Avec leur Ronde, on ne plaisante pas. Non mais. Ça leur avait quand même mis un peu de baume au cœur de savoir que ce Durand était devenu l'année suivante champion chez lui. Eh bien figurez-vous que cette année il a remis ça ! Si ! Là, tout le monde s'était dit, Cyrille Guimard en premier, que Dudu tenait "sa" belle annuelle. Mais le lascard s'était fait la malle allez, environ 200 km plus près de la banderole que d'habitude. Dites, il ne prendrait pas chaque année un peu plus de coffre,
notre Durand national ? Pourtant, celle-là, il n’y croyait pas... “ Les cent premiers kilomètres ont été terribles. J'avais mal aux jambes, et je suis allé dire à Cyrille qu'il ne fallait pas compter sur moi. A quelques bornes de l’arrivée, j'ai même été lâché.
Mais j'ai fait l’effort pour revenir, parce que Manu (Magnien) pouvait avoir besoin de moi." Deux démarrages plus loin, Dudu se servait lui-même. Et deux maillots, deux ! Ah oui, il a changé, Dudu. Mais maintenant, finis les grands raids solitaires, il va goûter aux pancartes de favoris. Vous savez, celles qui vous mettent une dizaine de gars sur le porte-bagages. En trois ans, Dudu a enterré sa vie de garçon, sa vie de modeste coureur. Il est devenu un monsieur que l'on suivra plus attentivement. Vous, les spectateurs, et, eux, les coureurs... Mais ne vous inquiétez pas. Durand a beau s'être fait un nom, Dudu restera Dudu. La fête de fin d'année aura encore lieu du côté de Ballots, là-bas, en 
Mayenne. A moins que ce ne soit à 
Saint-Laurent-sur-Gorre dans le Limousin où Laurence, celle qu'il a épousée au lendemain du championnat, l'a emmené. Ah oui, on oubliait. Le lundi, M. Jacky Durand s'est marié. Et en plus du “oui”, il annonçait qu'il ferait tout sur le Tour pour se montrer digne de son maillot... Il a parlé. Il s'est montré. Il a gagné. Vous ne le trouvez pas attachant, vous, ce Jacky ? Cyclisme internationnal          G
 
 
Bravo Jacky pour ce doublé. Mais pourquoi en rire ? 
Plus qu’une farce, ce fut une leçon de cyclisme. 
Hier, à la mairie de St-Laurent sur Gorre, sur le coup de 17h, Jacky Durand a accepté de prendre pour épouse Laurence, l'élue de son cœur, qui l'a fait quitter sa Mayenne natale pour le Limousin, voilà trois ans. Mais du côté de Ballots, Laval et Renazé, sa côte est intacte. Sa notoriété progresse même à mesure que ses triomphes, un par an mais toujours probants,  prolongent le règne éclairé des frères Madiot dans une région de tradition, aux confins de la Bretagne et des Pays de la Loire dont les plus fervents amateurs de vélo s'étaient donnés rendez-vous, dimanche, à Fontenay le Conte. 
Pour assister à l'exploit. A la victoire du dépassement de soi, de l’orgueil et du panache, sur le découragement et le je-m'en-foutisme aussi, qui furent par le passé, des caractéristiques de Jacky Durand . “Si je n'avais pas été champion de France il y a un 
an, cette année non plus, je ne serais allé cherché le titre, c’est sûr” commente-t-il. Il se connaît, ”Dudu”. Distancé dans la dernière côte avec Bourguignon et Gouvenou, souffrant, il n'a pas cédé à la facilité cette fois, question de  dignité et de solidarité avec ses copains qui s’apprêtaient à préparer le sprint pour Emmanuel Magnien. “Si, à deux kilomètres de l'arrivée on m’avait demandé de citer 50 noms pour la victoire, je n'y aurais pas mis le mien”, lâche-t-il. Mais une fois en position de gagner, j'ai retrouvé des jambes que j’avais perdues toute la journée.” Un petit signe de De Las Cuevas lui indiquant d'attaquer à 300 m de l'arrivée, et l'affaire était conclue. Son paquetage était prêt pour le Tour, avec des maillots Castorama. « Tant pis, je vais reprendre les vieux  "C'est marrant, pendant la course, Manu (Magnien) est monté à ma hauteur pour me dire: Ce maillot, il ne te va pas du tout. Tu étais beaucoup mieux avec l'autre Et le matin les commissaires m'ont dit que j'avais le droit de courir en bleu-blanc-rouge. Je n'ai pas voulu en changer, par superstition. » Jacky n'a jamais gagné avec son paletot tricolore, presque une habitude pour les porteurs de couleurs distinctives. D'ailleurs, l'an passé, Pascal Richard avait remplacé son maillot de champion de Suisse par celui d'Ariostea, qui allait disparaître des pelotons pour remporter le Tour de Lombardie. "Je vais en faire de même à Paris Tours ", songe Durand le blagueur.
Il a bien fait rire Frédéric Moncassin et Christophe Capelle, les battus, sur le podium, en entonnant, sur l'air de La Marseillaise, " aux artichauts bretons... '' à la place de “aux armes, citoyens...“. "Tous les trois, nous sommes de la même génération. Fred était avec moi au Bataillon de Joinville, et avec Christophe, j'ai couru la Course de la Paix. Alors, on n'allait pas se regarder en ennemis. " Mais dès le week-end prochain, ils vont reprendre la lutte dans les finals d'étapes.
« Avec Magnien, nous avons une carte à jouer en début de Tour, relève Jacky. Ensemble, nous avons pris l'habitude des efforts violents en fin de course. Cela aussi m'a été bénéfique pour surgir en fin de championnat de France. » Prochain coup de force ? Surprise.                                                                                                                                                     Ouest-France
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